Chroniques de l’ISS – #8

Les besoins naturels dans l’espace

[27 juin 2021]

Allo maman, pipi !
Eh, oui, il y a des besoins naturels que l’on doit satisfaire même dans l’espace, même à bord de l’ISS et même quand on est en EVA. Si les tout premiers astronautes devaient se retenir (ou pas, voir le vol d’Alan Shepard !!), ce n’est plus pensable pour des vols longues durées. Les astronautes d’Apollo avaient des sachets pour recueillir les mixions, cela suffisait, les missions étaient relativement courtes.

Mais avec les stations spatiales et la navette, la donne a changé, il fallait s’intéresser au problème des toilettes (the « loo » en anglais familier). Les Russes ont été en avance avec la station MIR et leur système installé dans la partie russe de l’ISS (dans le module Zvezda), c’est pour cette raison que la NASA a signé un contrat avec Energia (Russie) pour un nouveau système de toilettes avec un peu plus d’espace privé que le système actuel. L’urine devrait être récupérée par un système américain qui la recyclera en eau potable. Les Américains ont préféré acheter ce système aux Russes plutôt qu’en développer un eux-mêmes. Ce nouveau système (zero gravity toilet) est installé du côté américain de la station, l’ancien système restant côté russe. Cette extension est nécessaire car l’équipage permanent de la station à 6 membres est une réalité depuis 2009. On voit ici la maquette du système à Houston où les astronautes doivent s’entrainer de nombreuses fois avant de partir pour l’espace.

Crédit : NASA

La grande différence avec les systèmes terrestres, c’est bien évidement l’absence de gravité ; elle est remplacée par une aspiration par de l’air, de même il faut s’attacher différentes parties du corps (pieds, cuisses) avec du Velcro afin de rester dans la bonne position sinon on se mettrait à flotter. Les matières solides sont compactées et stockées avant d’être éliminées, et l’urine est recyclée. Les restes solides sont récupérés dans des sacs plastiques qui seront ensuite stockés dans un Progress et bruleront avec lui dans l’atmosphère

Récemment, la NASA a amélioré le système pour le rendre plus « compatible » à la gent féminine, étant donné qu’il y a de plus en plus d’astronautes femmes. En plus d’être plus léger que l’ancien système, le nouveau siège serait plus confortable pour les femmes, les odeurs devraient aussi être mieux contrôlées grâce à de nouveaux filtres à bactéries (voir illustration).
Quant aux sorties EVA qui peuvent durer jusqu’à 8 heures, l’astronautes est équipé de couches dont la fonction est la même que sur Terre. Il parait qu’elles ne sont pas toujours très étanches, mais peu de détails à ce sujet.

Allo, maman, j’ai soif !

Bon, vous avez tous compris si vous avez lu les lignes précédentes : tout se récupère à bord de l’ISS, donc les eaux usées comme : l’urine, l’eau nécessaire pour l’hygiène, ainsi que l’humidité de l’air conditionné. Plus de 90% de l’eau est recyclée à bord de l’ISS. Tout est recyclé par le WRS (Water Recovery System). Cela évite des transports coûteux de conteneurs d’eau en provenance de la Terre.

L’urine est filtrée en osmose inverse, l’eau est séparée de l’urée, l’eau à ce stade est récupérable. Je me doute qu’il puisse y avoir une certaine appréhension à boire, mais ils n’ont pas le choix et d’après les astronautes on ne remarque aucune différence. En fait l’ISS étant en deux parties, la partie Russe ne recycle pas l’urine, mais seulement les autres eaux usées. Seule la partie Américaine, recycle tout. En cas d’urgence, l’ISS possède toujours une réserve de 2000 litres d’eau. La consommation d’eau par astronaute est en moyenne de 3,5 l par jour.


Schéma de principe de tout ce qui se recycle à bord de l’ISS (domaine public)

On remarque que l’air (en fait l’oxygène) est fabriqué par électrolyse de l’eau, l’hydrogène est rejeté dans l’espace, le CO2 est éliminé par des filtres comme à bord d’Apollo. Le générateur d’oxygène et le recyclage d’eau sont situés dans le module Tranquility. Dans l’espace, en absence de pesanteur l’eau se met sous sa forme la plus simple physiquement (équilibre hydrostatique) : une bulle. Ici l’astronaute Kevin Ford regarde la bulle qu’il vient de former.

Crédit : NASA

Jean-Pierre Martin