J’ai rencontré Monsieur (avec un grand M) Albert Ducrocq alors que je venais juste d’entrer chez Air & Cosmos vers la fin de l’an 1999. A cette époque, il venait chaque vendredi soir à la rédaction sise alors avenue de la République, tenant de la main un petit cartable en cuir fauve, avec un loden et une écharpe autour du cou en hiver. Il était d’une grande discrétion, jusqu’au moment où une question, une conversation entraînait de sa part un commentaire ou une remarque qui se transformait alors en une discussion passionnée.

Avec mon confrère et ami Patrick Brunet, nous l’écoutions religieusement à double titre : d’abord parce qu’il était un des pères fondateurs de l’hebdomadaire aux côtés de Jean-Marie Riche et Jacques Morisset – sans mentionner Jacques Tiziou, Roland Desbarbieux, Robert J. Roux avant qu’il ne créé le Fanatique de l’Aviation avec Michel Marrand –, hebdomadaire auquel il resta fidèle jusqu’à son décès. Et aussi, surtout d’ailleurs, parce qu’il avait côtoyé le gratin de la « grande époque » de la conquête spatiale et notamment Gagarine, qu’il avait reçu à Paris. D’autre part, mon oncle ayant participé à l’étude et au lancement du satellite France 1, mon père lisant aussi bien Aviation Magazine qu’Air & Cosmos et s’intéressant de près à la conquête spatiale, les articles d’Albert Ducrocq figuraient en conséquence parmi les premiers lus.

Ces vendredis en fin d’après-midi donc, il venait discrètement livrer sa chronique pour le numéro suivant, chronique d’une demi-page dont le sujet était toujours de haute volée, généralement scientifique et couvrant un domaine ou un détail que nous ignorions. Ce n’est que bien après que j’ai fait « connaissance post-mortem » avec le personnage, dont l’intelligence, l’étendue de sa culture, sa modestie, son partage de connaissances me sont restées et me resteront encore longtemps en mémoire.

Antony Angrand

Journaliste à Air & Cosmos

Responsable de la rubrique Programmes & développements