Pour de l’or et du cuivre
Thomas Pesquet nous propose une vue étonnante prise depuis l’ISS, en postant sur les réseaux sociaux ce cliché avec le commentaire suivant : “Passage matinal au-dessus des États-Unis. Les couleurs sont plus vives et brillantes en milieu de journée, mais j’aime les teintes pastel et les ombres longues des premières heures du jour. Les goûts et les couleurs ça ne se discute pas :)”.
L’image a été prise le 11 mai 2021 à 12h41, à l’aide d’un Nikon D5 muni d’un objectif de 1150 mm ouvert à 10. Le Nord se situe vers 08 heures. Le cliché couvre une zone de 11 km par 15 km environ.
Nous sommes au-dessus d’un gigantesque site minier (4 km par 9 km) situé au Nouveau-Mexique, dans le Sud-Ouest des Etats-Unis. Cette mine appartient à Freeport-McMoRan Copper & Gold Inc., une société américaine spécialisée dans l’exploitation de minerai de cuivre et d’or. Freeport exploite de nombreuses mines à ciel ouvert un peu partout sur la planète.
Si vous n’avez jamais approché une mine à ciel ouvert, alors je vous recommande de le faire le jour où vous en aurez l’occasion : cela vaut le coup d’œil. Ici “déplacer des montagnes” prend tout son sens, car c’est littéralement ce qu’y font les hommes !
Il faut creuser, et creuser encore pour extraire des tonnes de minerai, le réduire en poudre puis après traitements chimiques, en tirer pour chaque tonne quelques centaines de grammes de cuivre et quelques dizaines de grammes d’or, au mieux ! Un travail de titan. Évidemment l’explosion des prix des matières premières tend à augmenter la rentabilité de ce type de mine et la demande toujours plus soutenue des marchés favorise ce mode de production. Suivez les cours du cuivre et de l’or, et vous verrez…
Mais revenons au cliché de Thomas. Pas sur du tout que “la montagne soit belle”. On observe d’immenses cavités béantes formant des entonnoirs et creusées en terrasses étagées sur plusieurs centaines de mètres de profondeur, puis sur les rebords, d’énormes accumulations de déchets de plusieurs centaines de mètres de haut. C’est en fait stupéfiant, énorme, presque inhumain ! Il faut des engins gigantesques pour obtenir un tel paysage, le remodeler de la sorte, et … des années de travail. Les “déchets” se comptent en centaines de milliers de tonnes par an car on exploite la roche sur des volumes immenses, et sur plusieurs kilomètres carrés. Evidemment, toutes ces activités créent des nuisances, de la poussière, du bruit, des vibrations et toutes sortes de pollutions chimiques qui potentiellement peuvent atteindre les nappes phréatiques et polluer les sols durablement. Ici comme partout ailleurs où cela existe, la végétation n’existe plus, pas plus qu’une quelconque faune ou biodiversité.
Alors oui, la planète Terre est belle, mais il faut garder à l’esprit que nos activités, nos modes de vie, de production et de consommation ont des conséquences. Thomas Pesquet en est un témoin privilégié…
Gilles Dawidowicz, président de la Commission de Planétologie
Crédits : ESA/NASA–T. Pesquet
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