Les instruments
Le JWST possède principalement 4 instruments :
- La caméra dans le proche infrarouge (NIRCam), fournie par la NASA par l’intermédiaire de l’Université de l’Arizona
- Le spectrographe dans le proche infrarouge (NIRSpec), qui fonctionne dans des longueurs d’onde similaires, fabriqué par Astrium GmbH et fourni par l’ESA et dont les détecteurs et l’ensemble de micro-volets sont, eux, fournis par la NASA.
- L’instrument dans l’infrarouge moyen (MIRI) – est fourni par un consortium d’organismes européens (dont le CEA) financés sur des fonds publics et par la NASA, la coordination étant assurée par l’ESA.
- Le détecteur de guidage de précision/caméra à filtre accordable (FGS/NIRISS), est fourni par les Canadiens de l’ASC
En ce qui concerne les instruments, voici un tableau résumant leur domaine d’utilisation en longueur d’onde. Les 4 instruments (Near-InfraRed Imager and Slitless Spectrograph [NIRISS], Near InfraRed Camera [NIRCam], Near InfraRed Spectrograph[NIRSpec], et Mid-Infrared Instrument [MIRI]) offrent une complémentarité d’utilisation. La structure qui supporte notamment ces instruments s’appelle l’ISIM (Integrated Science Instrument Module).

Crédit : NASA/JWST
L’ISIM est partagée en 3 régions :
- Région 1 : comprend le module cryogénique pour les instruments nécessitant de dépasser le refroidissement passif. Il va jusqu’à 39K et sert aux instruments : NIRCam, NIRSpec, MIRI et FGS. L’instrument MIRI nécessite une étape supplémentaire jusqu’à 7K.
- Région 2 : c’est l’électronique de contrôle (IEC) des refroidisseurs. Cette zone est maintenue aux alentours de 298K.
- Région 3 : située au niveau du bus, dans la partie chaude, et comprend des systèmes de commande et de traitement des données.

Crédit : NASA
La caméra NIRCam (Near Infra Red Camera)
NIRCam est la caméra principale grand champ de JWST dans le domaine du proche IR, de 0,6 à 5 microns. C’est aussi un élément essentiel pour permettre l’alignement du miroir primaire grâce à son analyseur de front d’onde. Elle a été conçue par l’Université d’Arizona et la société Lockheed Martin. Cette caméra comprend deux modules redondants de 2,2×2,2 arcmin séparés de 44 arcsec. Chaque module se répartit les longueurs d’onde entre 0,6 et 2,3 pour l’un (SW=short wavelengths) et 2,4 à 5 microns pour l’autre (LW=long wavelengths). Chaque détecteur du SW arrive sur 4 CCD de 2040 par 2040 pixels. Pour celle du LW la lumière est dirigée vers un seul CCD. Cinq filtres permettent de sélectionner les gammes de longueurs d’onde voulues. Un mode coronographe est aussi disponible. La NIRCam est particulièrement bien adaptée à l’étude de la formation des premières galaxies et amas ; la formation des premières étoiles, et à l’étude des exoplanètes et KBO.

Vue d’ensemble de la NIRCam. Le chemin optique de la NIRCam est particulièrement complexe. Crédit : NASA

Dernière phase de test de NIRCam chez Lockheed. Crédit : NASA Goddard
Le NIRSSpec (Near Infra Red Spectrograph)
Un des instruments les plus importants est celui fourni par l’ESA, le NIRSpec conçu pour détecter le rayonnement émis par les premières étoiles et galaxies qui se sont formées au début de l’existence de l’Univers, quelque 300 millions d’années après le Big Bang. Le spectrographe décompose le rayonnement infrarouge de ces objets lointains en fonction de ses différentes couleurs, générant ainsi un spectre qui fournira aux scientifiques des données capitales sur la composition chimique, les propriétés dynamiques, et l’âge de ces objets, ainsi que sur la distance qui les sépare de la Terre. Le NIRSpec sera capable d’observer simultanément pas moins de 100 de ces objets. Il fonctionne dans la gamme de 0,6 à 5 microns. La sélection des objets s’effectue à l’aide de micro-volets.
La technologie des micro-volets (microshutters en anglais) qui sont de très fines ouvertures de l’épaisseur d’un cheveu devraient permettre au télescope de voir des objets à des distances encore jamais atteintes. Le rôle de ces micro-volets est de masquer la lumière parasite d’objets non désirés situés au premier plan.

Réseau de microshutters, il y en aura 4. Crédit : NASA/Chris Gunn

Vue rapprochée des micro volets. Crédit NASA/Chris Gunn
Ces microshutters en silicium sont un développement du Goddard Space Flight Center (GSFC), Greenbelt, Md, USA. Chaque volet est entouré d’une boucle magnétique qui servira à l’ouvrir ou le fermer. Il y a 62.000 micro volets chacun mesurant 100 par 200 micron. Ces volets sont arrangés en quatre réseaux identiques de 171 lignes par 365 colonnes, ils laissent passer la lumière vers le détecteur IR de 8 millions de pixels. Ils devront fonctionner à 40K.
Procédure pour prendre une photo avec ce système : on va d’abord à partir de télescope terrestre prendre une photo de la zone du ciel à étudier, ensuite on va créer un masque avec ces microvolets qui ne laissera passer que la lumière des objets intéressants qui ira ensuite vers le détecteur. Cette philosophie est valable car ce télescope a un grand champ de vision et donc que ses observations peuvent contenir des millions de sources lumineuses. Ces microvolets vont donc aider à bloquer la lumière des objets perturbateurs. Harvey Moseley est le PI des microvolets au GSFC, d’après lui cette technologie devrait nous permettre d’aller plus loin (dans le temps) dans la détection d’objets, car les objets les plus brillants (les plus proches) seront masqués, procurant ainsi un gain en sensibilité de la détection.
Le spectro imageur MIRI (Mid Infra Red Instrument)
Comme son nom l’indique, il s’intéresse plus particulièrement au domaine de l’IR moyen (5 à 28 microns), il est dédié à :
- l’étude de la formation des premières galaxies ainsi que de leur évolution
- l’étude de la formation des premières étoiles
- l’étude des systèmes exoplanétaires avec un mode coronographe permettant d’imager des exoplanètes, ce même système permettant aussi la détection de disques circumstellaires.
C’est une coopération Europe/USA dont la part européenne est dirigée par l’ESA. Le CEA (Irfu) participe activement au développement de l’imageur MIRIM de cet ensemble. Il a 3 modes d’observation : imagerie, coronographie (différents masques) et spectro basse résolution. La France s’est particulièrement intéressée à MIRIM, l’imageur de MIRI. La coronographie (mise au point par le célèbre Bernard Lyot) est une technique permettant d’atténuer fortement la lumière d’un objet brillant pour permettre l’observation de son environnement (le Soleil pour sa couronne, une étoile pour ses exoplanètes etc..). Le LESIA a mis au point une nouvelle génération de coronographes, appelés coronographes de phase à 4 quadrants ou QPM (Four-Quadrant Phase Masks) très performants. Les détecteurs du MIRI nécessitent un refroidissement aux alentours de 6K ; un refroidissement cryogénique doit s’ajouter au refroidissement passif. Ce refroidissement cryogénique à plusieurs étages utilise de l’Hélium en circuit fermé.

Crédit : Northrop Grumann
Le refroidissement cryogénique (cryocooler) est fourni par Northrop Grumman. Plusieurs étages aboutissent enfin à une boucle JT (Joule/Thomson) permettant d’atteindre les 6K. En régime 6K il ne consomme que 20mW. En plus de l’imageur, un spectromètre à grand champ est prévu (MRS).