Hommages à Serge Koutchmy
Nous avons la profonde tristesse d’informer notre communauté scientifique du décès accidentel de notre collègue Serge Koutchmy, Directeur de recherche Émérite au CNRS, survenu le 27 mai 2023. Né en France, demeuré sa vie durant proche de la Russie où il avait préparé sa licence de physique à l’Université Lomonossov de Moscou, il fut recruté au CNRS en 1968 et soutint son doctorat d’État en 1972 sur la couronne solaire. Son champ de recherches a été incroyablement étendu : en physique solaire, il étudia un grand nombre de structures telles taches, granulation, facules jusqu’à la couronne (son modèle de densité faisait référence) en passant par les plumes, spicules, protubérances ; il observa aussi la lumière zodiacale, des comètes (Kohoutek, Halley, West), les anneaux de Saturne. Il est, bien sûr, connu pour ses multiples missions d’observations d’éclipses solaires totales, depuis sa première en 1968 en Sibérie jusqu’à sa dernière en 2019 en Amérique du Sud. Il a manifesté son goût de la découverte dans la conception des instruments, l’organisation et l’exploitation de ces missions, et y a déployé son incroyable énergie. Il a ainsi réalisé de grandes premières : observation en avion en 1973 avec le supersonique Concorde, en avion encore en 1990 au-dessus de la Finlande, images à très haute résolution avec le CFHT à Hawaï en 1991 – il fallut installer un voile pour protéger le télescope de 3,60 m avant et après la totalité – , utilisation du New Technology Telescope à La Silla en 2019. Son livre avec Pierre Guillermier Éclipses totales. Histoire, Découvertes, Observations fit date puis parut en anglais. Ces derniers mois, il rédigeait avec Pierre Léna Soleils éclipsés. Supersonique Concorde 001, couronne solaire et exoplanètes, dont il vit sortir le premier exemplaire quelques jours avant de disparaître.
Serge était à l’affût de toutes les techniques nouvelles : CCD, polariseurs, miroirs super- polis et observations depuis l’espace, avec la station Saliout jusqu’à son dernier projet de coronographe volant en formation. Il partageait sa passion avec ses nombreux collègues collaborateurs qu’ils soient Russes, Iraniens, Congolais, Grecs, États-Uniens, Français et autres. Il faisait aussi partager sa passion à de nombreux amateurs avec lesquels il aimait publier, bel exemple précurseur de science participative. Serge nous laisse le souvenir d’un géant intègre et rigoureux de la physique solaire. Il fut profondément éprouvé il y a peu de mois par la disparition de son épouse Olga, après plus de soixante ans de vie commune et un accompagnement de tous les instants lors de sa longue maladie. A ses enfants Valery et Natalie, nous exprimons respect et admiration envers l’homme chaleureux, curieux et passionné qu’était leur père.
Le 29 mai 2023 Pierre Léna, John Leibacher, Jean Mouette, Jean-Claude Vial
Ci-dessous, photo de Serge prise en 2011 à l’I.A.P.
Crédit : Jean Mouette – IAP
Un “puits” de connaissances solaires irremplaçable
L’hommage est concis sur Serge qui :
– a inventé le filtre à gradient radial utilisé pour toutes ses éclipses ;
– formé, dirigé de nombreux(ses) bac + 2, 3, 5 qui sont devenus T.S., Ingénieur, Docteur ;
– initié le projet C.I.S.A.F qui a conduit au CD-Lune diffusé aux Professeurs de physique de l’E.N. par centaines, dont j’ai été chef de projet.
Rencontré au club de tennis de St Rémy-lès-Chevreuse en 1998, sa deuxième passion de gaucher comme moi, j’ai comme astronome amateur depuis collaboré à l’IAP à ses travaux, lui fournissant matériel & connaissance en astro-imagerie pour ses expériences.
Olga était amie de ma Femme. Nous avons perdu deux grands amis et un “puits” de connaissances solaires irremplaçable car trilingue.
Henry Bovy
Lauréat SAF, membre SAF depuis ~1960
Nécessité de ne jamais perdre de vue le vrai Soleil
C’est avec une grande tristesse que j’ai appris le décès de Serge, tellement soudain. Encore il y a quelques semaines je recevais avec quelques collègues un email de sa part, questionnant comme toujours la physique des modèles et leur réalisme. Je me rappelle nos nombreuses conversations sur les modèles numériques du Soleil justement, sur la nécessité de ne jamais perdre de vue le vrai Soleil, celui que l’on observe en levant le nez de nos ordinateurs, ainsi que les nombreuses discussions
lors des quelques éclipses totales que j ai pu partager avec lui comme en Australie en 2012, ou plus récemment au Chili en 2019.
Quotidiennement je contemple dans mon bureau une de ses magnifiques photos d’éclipse totale qu’il m’a gentiment donnée, où toute la complexité et beauté de l’atmosphère solaire sont mises en exergue.
Sa perspicacité, ses sublimes observations, ses images incroyables de la couronne solaire lors des éclipses totales vont grandement nous manquer à nous tous, mais sa très grande contribution à notre science solaire elle restera.
Dr. Allan Sacha Brun
Directeur de recherche CEA Saclay
Serge a fait son voyage vers son Ithaque
ITHAQUE
En partant pour Ithaque
Souhaite que long soit le voyage,
Plein d’imprévu, plein d’impressions.
Nulle crainte de Lestrygons et de Cyclopes,
Et de Neptune en courroux.
Rien de tel sur la route,
Si tes pensées sont hauts et ton Être
Est noblement ému..
Les Lestrygons et les Cyclopes
Et le sinistre Neptune,
Tu ne verras point sur ta route,
Si tu ne les portes pas en toi,
Si ton âme devant toi ne les dresse.
Souhaite que long soit le voyage.
Que nombreux soient les matins d’été,
Ou’ ravi et joyeux,
Tu entreras dans des portes inconnus.
……………………………………………………………..
Que toujours ton esprit soit tourné vers Ithaque.
Arriver là, c’est le terme !
Sans hâte aucune dans le voyage,
Qu’il dure plutôt de longues années.
Et, lorsqu’enfin, la tête blanchie,
Tu atteindras l’ île,
Riche de ce que tu auras amassé,
N’attends plus rien trouver à Ithaque
Ithaque t’a donné le beau voyage,
Que, sans elle, tu n’aurais jamais décidé.
Elle n’a plus rien à te donner.
Et si tu la trouves pauvre, ne te crois pas trompé
Aussi savant, aussi sage,
Tu as déjà du comprendre ce que signifient les Ithaques !
Dr. Eleni Dara
Académie d’Athènes
L’expert des éclipses
J’ai rencontré Serge Koutchmy à la SAF au début des années 90. Il me fut présenté par Audouin Dollfus comme l’un des grands experts de physique solaire de notre époque, et comme un spécialiste de l’observation des éclipses totales. Son “palmarès” était impressionnant, tout comme sa personnalité ! Il reçut d’ailleurs en 1997 le Prix Jules Janssen, la plus haute distinction de la SAF, partagée cette année-là avec Elizabeth Nesme, elle-même spécialiste de physique solaire de l’Observatoire de Meudon.
Serge inspirait le respect, et son autorité naturelle doublée de son immense expérience en matière solaire, lui permettaient de nous donner confiance pour le dernier grand défi que notre Société allait affronter au XXè siècle : il fut ainsi un conseiller précieux pour les opérations liées à l’Éclipse de 1999, pour laquelle la SAF prit en France le leadership de l’organisation des festivités associées. Serge œuvrait également à la SAF comme président de Commission, qu’il anima avec passion et dévouement.
Il fut aussi l’un des experts invités à participer à la grande table-ronde que nous avons organisée en avril 2001 à l’occasion des 40 ans du vol de Gagarine au Musée de l’Air et de l’Espace. Sous le pilotage de Pierre-François Mouriaux, j’animais de riches échanges entre les invités parmi lesquels se trouvaient Jean-François Clervoy, Jean-Jacques Favier, Jean-Pierre Haigneré, Audouin Dollfus, Gary Mamon, Jean-Baptiste Renard, Christian Lardier et bien entendu Serge. Nous parlions alors des astronautes au service de l’astronomie. Cette séance fut mémorable et eut un grand succès. Nous en garderons longtemps encore un souvenir ému.
Gilles Dawidowicz
Président de la Commission Planétologie (SAF)
In memoriam
Serge faisait rêver les astronomes amateurs avec ses splendides photos d’éclipse et de couronne solaire que nous découvrions lors des Journées des commissions de la SAF, à l’observatoire de Meudon dans les années 1980-90. Les jeunes observateurs étaient stimulés et entraînés par ce tourbillon d’images. Serge Koutchmy ouvrait volontiers son labo à de jeunes passionnés. Amateur, lui le chercheur passé par de nombreux observatoires solaires dans le monde, il l’était dans l’âme ; un diffuseur sans complexe de la science.
Il recevait les fervents d’imagerie dans son bureau de l’IAP où de nombreux observateurs amateurs ont été formés. J’ai eu le privilège de travailler avec lui pour préparer, en tant que nouveau rédac-chef d’Observations & Travaux, la publication des actes de la rencontre d’avril 2000 à l’IAP ‘’Eclipse et couronne solaire’’. Il avait fait confiance à la SAF pour publier cette rencontre internationale où l’on trouvait des non-professionnels de chez nous : Christian Buil, Patrick Martinez, Christian Viladrich.
C’était dans sa nature de rassembler les observateurs de toutes origines.
A nouveau, dans Observations & Travaux, il nous confiait ses conseils d’observation pour préparer l’éclipse du 29 mars 2006 et surtout, dans un long article, celle du 22 juillet 2009, d’une longueur exceptionnelle.
Sa simplicité, la facilité de son contact lui donnent dans nos cœurs la qualité d’un homme d’exception, dans la lignée de notre maître : Camille Flammarion.
Pierre Durand
Ancien rédacteur en chef d’Observations & Travaux (SAF)
L’ami unique
L’ami unique et chaleureux collègue, Serge Koutchmy, nous manque beaucoup. Serge a toujours eu des points de vue et une compréhension inspirants et il a beaucoup réfléchi sur les grandes et petites questions concernant notre domaine commun de la science – la physique solaire.
Sincèrement,
Oddbjørn Engvold
Université d’Oslo
Ancien Secrétaire Général de l’Union Astronomique Internationale
Un astronome professionnel toujours pédagogue
Je ne peux qu’abonder dans le sens de la vision d’un astronome professionnel toujours pédagogue, encourageant et bienveillant envers les amateurs qu’il faisait participer à ses projets et missions !
Thierry Legault
Astrophotographe
Crédit : Thierry Legault
Une grande perte sur le plan scientifique et sur le plan humain
J’ai fait la connaissance de Serge Koutchmy au sein de la SAF, dans les années 1980. J’ai beaucoup aimé son professionnalisme, son charisme, son ouverture vers les astronomes amateurs, et nous sommes devenus amis. Dans les projets que nous avons menés ensemble, Serge m’a toujours considéré comme un collaborateur à part entière, bien que je ne sois qu’un astronome amateur.
En 1987, Serge a accepté de rédiger le chapitre sur les éclipses de soleil dans le Guide de l’Observateur, ouvrage collectif destiné aux astronomes amateurs. Par la suite, il a bien voulu préfacer le livre que j’avais écrit avec Philippe Morel à l’occasion de l’éclipse de 1999. Pour l’éclipse du 22 juillet 1990, Serge et moi avions monté ensemble l’expédition pour aller observer cette éclipse en Finlande, au-dessus des nuages à bord d‘un Falcon 20 prêté par Europe Falcon Service, et dont un hublot avait été remplacé par des lames de fermeture optiques montées par un laboratoire de Supaéro. Une grande aventure, et de magnifiques souvenirs ! En raison du mauvais temps quasi général ce jour-là sur le trajet de l’ombre lunaire, nous avions été une des rares équipes à ramener des résultats sur cette éclipse. Pour l’éclipse du 11 juillet 1991 qui passait sur l’observatoire du Mauna Kea, Serge avait été retenu comme PI pour observer cette éclipse avec le CFHT de 3,6 m (qui était devenu à cette occasion le plus puissant télescope solaire au monde…), et il avait eu la gentillesse de m’inviter dans son équipe. Serge et moi avons ensuite entretenu des correspondances régulières. Et nous avons fait un nouveau voyage commun à l’occasion de l’éclipse du 11 juillet 2010, que Serge et son équipe étaient venus observer au sein du voyage de groupe organisé par l’association ADAGIO sur le petit atoll d’Hao, en Polynésie.
La disparition de Serge est une grande perte sur le plan scientifique, mais aussi sur le plan
humain.
Patrick Martinez
Association ADAGIO
Crédit : Patrick Martinez
L’investi dans les collaborations ProAm
Serge Koutchmy a été depuis très longtemps investi dans les collaborations ProAm en animant des groupes et en étant très moteur pour développer des outils partagés avec les amateurs.
Deux exemples sont emblématiques pour moi. En 1986 avec sa conception de chambres photographiques réalisées en plusieurs exemplaires avec des objectifs Clavé et réducteurs de focal et supports de films 6×6 pour le passage de la comète de Halley. A l’époque à l’ANSTJ, il nous avait transmis une telle chambre pour notre mission à l’Île de la Réunion que Jean-Louis Lefebvre avait exploité. Ensuite c’est bien entendu toutes ses activités sur le Soleil et en particulier les Éclipses Totales de Soleil sur lesquelles il animait sans relâche des groupes ProAm pour organiser des missions, collecter des données, motiver des mesures et comprendre les exploitations.
En outre, il était toujours disponible pour des conférences, ateliers et réunions où les collaborations ProAm constituaient la motivation de ses actions et projets.
Nous ne l’oublierons pas et il restera un de nos modèles.
Astronomicalement
Thierry Midavaine
Président de la Commission des Techniques en Astronomie Amateur (SAF)
Des idées très intéressantes et pertinentes, parfois loufoques ou irréalisables
Serge Koutchmy est une des personnes qui ont clairement joué un rôle important dans ma carrière en astrophysique. Je l’ai connu début 1983 (il y a tout juste 40 ans), un peu avant la soutenance de ma thèse de doctorat (soutenue en mai 1983), et cela juste à temps pour pouvoir participer avec lui à ma première mission éclipse en Indonésie (juin 1983). J’ai ensuite travaillé avec Serge entre 1983 et 1988, avec de nouvelles missions éclipse à Nouméa (1984) et de nouveau en Indonésie (1988), sans oublier la comète de Halley en 1986 (voyages à Tamanrasset, puis de nouveau à Nouméa). En 1987, Serge Koutchmy m’a proposé de l’accompagner durant les trois mois d’été boréal à l’Observatoire de Sacramento Peak, au Nouveau Mexique (États Unis). A cette occasion, je me souviens fort bien qu’il m’a dit: “dans trois mois, tu parleras anglais !” (langue que je ne parlais pas bien du tout auparavant). Grâce à lui, en trois mois, avec l’aide de quelques cassettes et d’un livre que j’ai encore dans ma bibliothèque, je parlais à peu près couramment cette langue en arrivant aux USA, mi juin 1987 !!!
Je suis retourné durant l’été 1988 à l’Observatoire de Sacramento Peak, toujours accompagnant Serge, mais seulement pour un mois, cette fois-ci. Nos chemins ont ensuite divergé, mais je suis toujours resté en contact avec lui, le visitant lors de mes passages à Paris et ayant plaisir à discuter avec lui. Je le tenais informé de mes projets d’observation d’éclipses totales de Soleil. Il avait souvent des idées très intéressantes et pertinentes, parfois loufoques ou irréalisables, mais jamais aberrantes. Je lui faisais suivre mes photographies d’éclipses totales de Soleil et il les utilisait souvent en collaboration avec d’autres personnes (Cyril Bazin, etc.). C’est pour tout cela, et pour bien d’autres choses, que je le remercie, aussi bien pour tout ce qu’il m’a apporté, mais aussi pour son ouverture d’esprit légendaire en ce qui concerne le monde de l’astronomie d’amateur, à une époque où le monde de l’astronomie professionnelle restait tout à fait fermé aux amateurs (cela a heureusement bien changé en 35 ans)…
Je pensais pouvoir le revoir dans son bureau à l’IAP lors de mon prochain passage en France, en février 2024, mais cela n’aura hélas pas lieu. Je reste très attristé par sa disparition tragique. Il nous manquera et j’aurai personnellement une pensée pour lui lors des prochaines éclipses totales ou annulaires de Soleil que je pense pouvoir aller observer (USA, Mexique, Espagne, Afrique du Nord, etc.).
Christian H. R. Nitschelm
Académico, profesor titular
Centro de Astronomía (CITEVA)
Universidad de Antofagasta
Un homme qui bouillonnait d’idées
C’est avec une grande émotion que j’ai appris le décès de Serge Koutchmy. Il est terriblement difficile de parler de lui au passé tant Serge reste présent dans nos mémoires et ses projets toujours vivants. Il venait souvent au Pic du Midi, depuis longtemps, pour des missions d’observation ou d’expérimentation. Missions toujours denses et riches où il ne ménageait pas sa peine, travaillant jour et nuit pour que tout soit prêt pour le ciel « espéré coronal » du lendemain et faisant face avec énergie et humour aux péripéties rencontrées parfois. Tous ceux qui l’ont connu pendant ces missions étaient impressionnés par son dynamisme, son enthousiasme communicatif et sa connaissance étendue de la physique solaire, mais aussi par son attitude attentive aux autres. Son savoir concernant les techniques d’observation et les instruments solaires installés partout dans le monde ainsi qu’à bord des observatoires spatiaux était immense ; il avait travaillé sur beaucoup d’entre eux. Serge a fait progresser énormément la connaissance de notre étoile, notamment grâce à ses superbes et précieuses observations d’un très grand nombre d’éclipses totales, quelques fois de grandes premières. La qualité des résultats qu’il en obtenait est reconnue mondialement. Mais il savait aussi l’importance des observations systématiques de longue durée à l’échelle du cycle solaire et a toujours été un fort soutien des programmes menés au Pic du Midi pour l’étude de l’activité solaire. Serge était un homme qui bouillonnait d’idées, travailler avec lui était passionnant, et en même temps il réservait toujours un regard amical et prévenant pour ceux qui l’accompagnaient. Ses conseils étaient toujours avisés, c’étaient ceux d’un ami. Comme beaucoup, je conserve le souvenir de longues conversations téléphoniques où le temps passait trop vite, d’échanges écrits fournis pour discuter d’un projet ou commenter une publication, de débats au cours d’un colloque, d’une réunion ou dans son bureau de l’IAP et surtout de belles heures passées autour des coronographes ou des instruments du Pic.
Nous pensons beaucoup à ses enfants, à sa famille et à ses proches et partageons leur peine. Merci pour tout Serge.
Jacques-Clair Noëns
Observatoire du Pic du Midi
Les Observateurs Associés
Charmé par sa gentillesse et la subtilité de sa pédagogie
C’est au Pic du Midi que j’ai rencontré Serge pour la première fois, il y a plus de 20 ans. Il m’avait impressionné par son savoir sur les phénomènes de la couronne solaire. Il m’avait charmé par sa gentillesse, et la subtilité de sa pédagogie. Avec le temps, nous étions devenus amis, courant ensemble après les occultations solaires pour faire des expérimentations à la limite du possible. Nous avions des projets en commun qui ne se concrétiseront donc jamais, et resteront en l’état pour d’autres, un jour peut-être, ainsi avance la science. La science qu’il faut diffuser et Serge m’avait fait l’honneur de préfacer un de mes ouvrages de vulgarisation, le regard des hommes sur le Soleil, j’en ai été flatté, c’était une caution de poids. Adieu Serge et merci pour ton amitié, merci pour tout.
Serge Rochain (OA)
Passion et bienveillance
Mon premier contact – indirect – avec Serge date de 1974, avec la découverte en première page d’une revue d’astro d’une extraordinaire image d’éclipse de Soleil prise avec un filtre radial.
Adolescent, j’ai gardé très longtemps cette image au-dessus de mon lit. J’ai finalement rencontré Serge en 1998, par l’entremise de Patrick Martinez, suite à l’image que j’avais faite de l’éclipse de 1998. Nous sommes devenu amis rapidement. Son bureau à l’IAP était la caverne d’Ali Baba pour moi simple amateur. Et j’ai pu voir de mes yeux ébahis les plans films de ses fameuses images d’éclipses.
Serge ne comptait pas son temps et était d’une grande bienveillance avec les amateurs. Il les a souvent embarqués dans ses missions. Il m’a fait découvrir SacPeak. Et il n’était pas le plus fatigué lors de nos matchs de ping pong à 2800 m d’altitude ! Serge était également mélomane. ll m’a fait découvrir l’opéra – à ciel ouvert et sous les étoiles – de Santa Fé. Il m’a ensuite emmené dans une bonne dizaine de missions d’éclipses ou autre, au sol, et aussi en avion lors de l’éclipse d’Angola de 2002.
Serge avait une grande admiration pour Bernard Lyot. La mise au point d’instruments – comme le coronographe à miroir et à occultation externe dont une version à miroir superpoli dort peut-être encore dans une caisse à Sacpeak – était un de ses multiples talents.
Serge m’a fait la gentillesse et l’honneur de bien vouloir préfacer notre livre Astronomie Solaire, et n’a cessé de m’encourager pendant toute sa rédaction. Sa disparition laisse un grand vide.
Christian Viladrich
Astronome Amateur – Prix Julien Saget SAF 2000 – Rédacteur en chef d’Astronomie Solaire
Crédit : Christian Viladrich
Une rencontre inattendue
Ma rencontre avec Serge Koutchmy remonte à 1999, quand je travaillais sur la rénovation du hall de l’espace au musée de l’Air et de l’Espace du Bourget : le secrétariat m’a un jour passé un message de l’astronome qui, souhaitant débarrasser une cave à l’Observatoire de Paris, nous proposait de récupérer un très bel objet : l’exemplaire de rechange du (pesant) support d’appareil photo de l’expérience PCN (Photographie du Ciel Nocturne), développée par l’Institut d’Astrophysique de Paris pour être installée sur un hublot de la station soviétique Saliout 7 à l’occasion du premier vol spatial de Jean-Loup Chrétien (mission Premier Vol Habité). Ce fut l’une des plus rapides transactions qu’il m’ait été donné de faire au musée ! A peine étais-je allé voir la pièce sur place qu’elle nous parvenait au Bourget, prête à être exposée – elle se trouve toujours aujourd’hui au pied du scaphandre Sokol du premier Français de l’espace. Naturellement, Serge Koutchmy fut sollicité pour raconter l’histoire de l’expérience dans le numéro spécial de l’Astronomie que nous avons publié en juin 2002 pour le vingtième anniversaire de la mission PVH. Il fut également l’un des participants à la mémorable table ronde « Les astronautes au service de l’astronomie » organisée avec Gilles Dawidowicz au Bourget en avril 2001, à l’occasion des 40 ans du vol de Gagarine. A ses côtés se trouvaient les astronautes français Jean-François Clervoy, Jean-Jacques Favier et Jean-Pierre Haigneré, les astronomes Audouin Dollfus, Gary Mamon et Jean-Baptiste Renard, ainsi que le journaliste Christian Lardier.
Pierre-François Mouriaux
Commission Astronautique et Techniques Spatiales (SAF)
Crédit : Pierre-François Mouriaux