Entre les golfes d’Aden et d’Oman
Le 27 avril 2021, Thomas Pesquet nous offre une première vue de la Terre prise depuis la Cupola. Il poste ce cliché magnifique sur les réseaux sociaux avec le commentaire suivant : “ Voici l’endroit préféré des astronautes à bord de la Station spatiale internationale : la Cupola, un équipement construit en Europe ! C’est notre fenêtre sur le monde, le lieu idéal pour boire un café, appeler nos proches (oui, on peut téléphoner depuis l’espace), ou simplement admirer la vue. Je me suis promis d’y passer un peu plus de temps lors de la #MissionAlpha (mais promis ESA, ça n’empiétera pas sur mon travail) “.
L’image a été prise le 25 avril à 09h44, à l’aide d’un Nikon D5 muni d’un objectif de 16 mm ouvert à 14. Le Nord se situe globalement vers 07 heures.
L’astronaute nous présente la Cupola, un module particulier de la Station en forme de dôme qui mesure environ 2 m de diamètre, 1,5 m de hauteur et pèse 1,8 tonne. Sa structure est en aluminium. Cette coupole d’observation panoramique est installée à bord pour permettre aux passagers de contempler la planète Terre et ses splendeurs, et sert également de poste d’observation lors des amarrages des différentes capsules qui rendent visite à l’ISS, ainsi que lors de l’utilisation du bras robotique. Construite essentiellement par l’Italie et la société Thales Alenia Space, la Cupola est mise sur orbite en février 2010 grâce à la mission STS-130 de la navette spatiale américaine Endeavour. Dotée de six hublots sur les côtés et d’une fenêtre centrale zénithale permettant une vision panoramique sur 180°, la Cupola est conçue pour résister aux impacts des micrométéorites. Chaque hublot est équipé d’un volet de protection qui peut être fermé manuellement et se compose de plusieurs lamelles de verre optique très résistantes. La Cupola comporte enfin un système de régulation thermique passif (revêtement extérieur) et actif (circuit d’eau connecté au système de régulation thermique du module Tranquility).
Mais revenons au cliché. Au travers des hublots 5 et 6, on observe la côte située entre le golfe d’Aden (autrefois appelé golfe de Berbera) et le golfe d’Oman. Au hublot 5, nous sommes à l’entrée du golfe d’Aden, entre la corne de l’Afrique qui se trouve en Somalie (haut droite du hublot 5) et la péninsule arabique dont les côtes Yéménites sont bien visibles au centre des deux hublots 5 et 6 avant le limbe terrestre. Ainsi, le golfe d’Aden sépare le continent africain du continent asiatique et relie la mer Rouge à la mer d’Arabie. Au centre du hublot 5, on trouve le cap Guardafui, alias Gees Gwardafuy ; c’est un cap situé en Somalie dans la région du Pount, une petite région francophone autonome. Notez à environ 100 km au large du cap Guardafui, la présence d’une petite île d’environ 35 km de long : il s’agit d’Abd al Kuri, une île de l’archipel yéménite de Socotra dont on aperçoit la pointe principale mais qui est cachée par le montant séparant les deux hublots 5 et 6. Abd al Kuri, sous la fine couche nuageuse, est une petite île montagneuse sauf dans sa partie centrale. Elle a une superficie de 133 km² tandis que sa largeur varie de 2 km à 6 km. La côte nord se compose de plages sablonneuses tandis que sa côte sud se compose de falaises abruptes.
A propos de la Somalie, pays un peu plus étendu que la France et dont la pointe Est est bien visible depuis le hublot 5, il faut préciser qu’elle possède 3000 km de côtes et qu’elle est essentiellement composée de plaines arides. Le Yémen pour sa part possède 1900 km de côtes et son relief est caractérisé à l’Ouest par de hautes montagnes que l’on devine sur le cliché dont les monts Sarawat. Le climat y est presque partout désertique, très chaud et humide le long de la côte Ouest, tempéré dans les montagnes occidentales affectées par les moussons. Le désert situé dans l’Est du pays, l’Hadramaout, est très chaud et sec ce qui fait que le pays souffre de désertification et du manque d’eau, situation amplifiée par de fréquentes tempêtes de sable.
Enfin, tout à gauche du hublot 6, on aperçoit les côtes d’Oman, situées à l’extrême Sud-Est de la péninsule d’Arabie. Oman est bordé par la mer d’Arabie au Sud et au Sud-Est, le golfe d’Oman au Nord-Est, les Émirats arabes unis au Nord, l’Arabie saoudite à l’Ouest et le Yémen au Sud-Ouest. Une vaste plaine désertique couvre la majeure partie du centre du pays et plusieurs chaînes de hautes montagnes dont le Jebel ach-Chams s’étendent le long de ses côtes Nord et Sud-Est, où la plupart des villes sont situées : Mascate, la capitale, Matrah et Sour au nord, Salalah au sud. Le climat d’Oman est chaud et sec à l’intérieur des terres, mais humide au bord de la mer. Dans les montagnes, de nombreuses oasis tempérées utilisent les eaux souterraines et des systèmes de falajs pour leurs cultures en terrasses. De la mer d’Oman au Sud, contiguë au Yémen, au golfe d’Oman au Nord, face à l’Iran, la côte omanaise compte 1300 km de plages. Au sud, se trouve l’île de Masirah que l’on voit très bien par le hublot 6.
Pour finir, et bien plus près de Thomas Pesquet, vous noterez la présence de 3 capsules amarrées à Nadir : le Progress MS-16 (amarré au module PIRS), le Soyouz MS-18 Gagarine (amarré au port Rassvet) et le Cygnus NG -15 (amarré au port Unity).
Gilles Dawidowicz, président de la Commission de Planétologie
Crédits : ESA/NASA–T. Pesquet
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