Compte-rendu du Symposium Camille Flammarion
Société astronomique de France
Montigny-le-Roi
Jeudi 18 octobre 2025 de 9h40 à 15h30
Le symposium a été précédé d’un rencontre avec des scolaires le Jeudi 17 octobre, où Jonathan Giné a présenté la vie de Camille Flammarion par l’image avec un commentaire vivant, suivi d’un voyage dans le Cosmos, à partir des magnifiques photographies de l’astram Stéphane Rousseau, où le conférencier a pu montrer de nombreuses nébuleuses et galaxies.
Les enfants des deux classes de 6e du collège Camille-Flammarion, ainsi que les élèves de CE1, CE2, CM1 et CM2 des écoles de Montigny-le-Roi et Provenchères-sur-Meuse, ont été très attentifs aux propos de l’orateur, puis à l’atelier d’astronomie de M. Alain Mory qui présentait une lunette astronomique équatoriale de 70 mm d’ouverture, et expliquait les mouvements du système solaire avec un planétaire. Le final étant une initiation à la géographie céleste et à l’exploration de la Lune par Eric et Fabien Gruot de l’association Terre et Ciel du Barrois, à l’aide d’un planétarium gonflable d’une belle facture.
La mission d’initiation à l’histoire de Camille Flammarion et à l’astronomie furent bien remplie d’une part par la SAF et son représentant, et d’autre part, par les intervenants locaux. Une très belle expérience pour tout le monde.
Samedi 18 octobre 2025 de 10h00 à 18h00
Le symposium a été l’occasion de réunir des descendants d’Ernest Flammarion, cousins sur l’arbre généalogique, et l’arrière-petite-fille de Ferdinant Quénisset ; Mme Véronique Barrière. Nous étions en famille en quelque sorte, pour ce symposium se tenant dans la salle des fêtes de son village natal. Il était émouvant de pouvoir parler devant ces « Flammarion » présents dans la salle, avec un public qui attendait avec impatience l’ouverture de ce symposium. Étaient présents des membres du club d’astronomie NOVA de Juvisy-sur-Orge, un parisien venu spécialement écouter les conférenciers, et du public de Montigny-le-Roi et des communes environnantes. En tout une soixantaine de personnes ayant en commun de partager une passion pour la vie et l’œuvre de Camille Flammarion.A 10h00 précise M. le Maire de Val-de-Meuse ; Didier Romary, prononce un discours apprécié, pour accueillir le public et la Société Astronomique de France -fondée en 1887 par Camille Flammarion-, pour commémorer la disparition de l’illustre astronome voici 100 ans le 3 juin 1925. Il présente les différents orateurs et interventions de la journée, et invite le Secrétaire-Général de la SAF M. Patrick Baradeau, à prendre la parole pour inaugurer le symposium dédié à l’enfant du pays.
A 10h15, Patrick Baradeau, Secrétaire-Général de la SAF, remercie les auditeurs et les conférenciers d’être présents pour célébrer la mémoire de Camille Flammarion, il présente la Société Astronomique de France, et passe la parole au premier conférencier qui est Gilles Dawidowicz, Vice-Président de la SAF, qui va parler des enjeux de la planétologie.
10h15 à 11h30, Gilles Dawidowicz nous montre de superbes images de Mars, de la Lune, d’autre corps du système solaire qui suscitent l’admiration des auditeurs. Il expose très clairement l’impactisme sur la Lune par des voyageurs interplanétaires : les météores, qui ont formés la curieuse géographie sélénite. Il rappelle que l’astronomie de l’époque de Camille Flammarion, pensait que les formations lunaires étaient d’origine volcaniques, une théorie qui faisait consensus, et les phénomènes transitoires lunaires étaient associés à des manifestations volcaniques. Mais la planétologie moderne, a prouvée qu’il n’en était rien, l’origine des cratères lunaires sont dus à l’impactisme de différents corps à la surface de notre satellite naturel. Cet impactisme a même été filmé par une sonde spatiale en orbite autour de la Lune, démontrant par l’image l’impactisme. Gilles explique au cours de sa conférence, les enjeux de l’exploration de Mars, l’erreur des canaux martiens qui furent au cœur d’une polémique au XIXe siècle, dont Camille Flammarion sera l’un des grands partisans, jusqu’à revenir sur sa position à la fin de sa vie. Il est rappelé au cours de cet exposé, que Mars a bien abrité de l’eau, qu’il existe des traces d’érosion hydriques, des lits de rivières, qui a été découverte par les différentes missions spatiales envoyées sur la planète rouge. L’orateur nous parle également du retour de l’homme sur la Lune, et peut-être son arrivée dans quelques décennies sur Mars. Gilles est applaudi chaleureusement par un public conquis.
11h30 à 12h30 : Patrick Baradeau dans exposé Flammarion et l’histoire de la SAF, de 1887 à nos jours, présente la famille de Camille aux auditeurs. Il nous rappelle qu’il était l’ainé d’une fratrie de quatre enfants : Ernest qui deviendra le célèbre éditeur, Berthe sa sœur qui aida le jeune Camille dans la rédaction de sa cosmographie universelle, Marie la sœur cadette qui naîtra à Paris, leurs parents Jules-Antoine Flammarion et Françoise Flammarion née Lomon. Patrick nous parle de l’énigme historique concernant la véritable raison de l’éviction de l’Observatoire impérial de Paris par Urbain Le Verrier, l’histoire communément admise : la publication de la Pluralité des Mondes Habités en 1862 qui aurait irrité Le Verrier n’est pas certaine. Il existe très probablement une autre raison, que les historiens doivent documenter dans leurs recherches autour de Flammarion.Le conférencier expose de nombreux aspects de la vie très riche de Camille Flammarion, et passe la parole à Jonathan Giné pour des apports complémentaires sur la manière dont l’astronome de Juvisy abordait le spiritisme, sur son étude de la paléontologie, et ses recherches sur la botanique.
Patrick Baradeau présente l’histoire de la Société Astronomique de France créée en 1887, dont l’originalité sera de réunir des astronomes institutionnels et des amateurs éclairés, très rapidement reconnu d’utilité publique le 4 avril 1897. Sans oublier l’Astronomie fondée avant la SAF en 1884, et qui est la plus ancienne revue d’astronomie de France toujours publiée sans interruption depuis sa fondation et qui reste l’un des grands titres en astronomie actuel. Patrick est applaudi très chaleureusement par le public, après ce premier exposé de notre symposium.
Pause déjeuner entre 12h30 et 14h00 : La Mairie de Val-de-Meuse a prévu des repas pour les conférenciers de la SAF, dans une salle adjacente. Les agapes se passent dans la bonne humeur, et permettent un échange amical entre toutes et tous.
À 14h00, le symposium reprend avec la conférence de Jean Guérard, dynamique directeur de l’Observatoire Flammarion de Juvisy-sur-Orge. Il aborde le thème du Fonds Flammarion, présenté comme une mémoire vivante de l’astronomie de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Le conférencier montre à un public captivé de superbes photographies, dont certaines inédites, tirées du Fonds documentaire C. Flammarion de la SAF.
Il évoque la précocité de Camille Flammarion, qui possédait déjà une bibliothèque de vingt livres à l’âge de six ans, et établit un parallèle avec les trois mille ouvrages conservés de sa bibliothèque à Juvisy. Jean Guérard explique également le rôle du Bureau des longitudes, créé en 1795 pour fournir des mesures de longitude précises à la Marine, optimisant ainsi le commerce et l’efficacité militaire en mer. Il souligne que Camille, bien qu’astronome, s’ennuyait dans son poste de calculateur, car celui-ci s’éloignait de l’observation et de l’exploration de l’univers.
Le conférencier avance que Flammarion avait développé un modèle économique original, utilisant ses talents de conteur et de vulgarisateur pour exposer les sciences, notamment l’astronomie, à un public fidèle grâce à ses livres et articles dans des revues comme Le Siècle. Il rappelle également le renouvellement de l’expérience du pendule de Foucault au Panthéon en 1901, devant plus de deux mille personnes, ainsi que la conception en 1902 d’une lunette des écoles destinée aux instituteurs pour initier les enfants à l’astronomie pratique. Après avoir dévoilé ces multiples facettes de la vie de Camille, Jean Guérard est chaleureusement applaudi par un auditoire conquis.
A 15h00 Jonathan Giné, instigateur de ce symposium dans la petite ville de naissance de Camille Flammarion, aborde un sujet délicat : Flammarion et la Relativité générale d’Albert Einstein, une histoire méconnue. Il annonce déconstruire une idée basée sur une lecture incomplète d’un article important de Camille Flammarion, publiée dans le Bulletin de la Société Astronomique de France volume 1920 p. 125 intitulé « l’attraction newtonienne et la théorie d’Einstein ».
Pour cette communication, Jonathan a longuement étudié les bulletins de la SAF (BSAF) entre 1905 et 1930, afin de fournir des documents positifs, pour démontrer que Camille Flammarion comprenait au moins les 3 tests demandés par Albert Einstein pour vérifier sa théorie de la Relativité générale, mais aussi le fait que le temps soit la 4e dimension de l’espace. Le conférencier souligne l’importance de ces bulletins pour l’histoire de l’astronomie et des sciences entre la fin du XIXe s. et le XXe s. c’est encore en grande partie une terra incognita pour l’historien, malgré ici et là, des travaux basés sur ces précieux BSAF.
Nous apprenons que Camille Flammarion suit de très près la nouvelle physique d’Einstein, et charge un ancien président de la SAF et ami, le Comte Aymar de la Beaume Pluvinel, pour rendre compte de l’observation de l’éclipse totale de Soleil par l’équipe d’Arthur Eddington le 29 mai 1919 , qui confirmera le premier test demandé par Albert Einstein, à savoir la déviation des rayons lumineux des étoiles passant à proximité du Soleil.
Jonathan fournit des documents issus des BASF de 1919, 1920 à 1922, qui démontrent que Camille Flammarion encourage les libres débats autour de la Relativité générale au sein de la SAF, et le public peut constater qu’il y a des « pour » et des « contre » de la nouvelle physique. L’orateur contextualise les difficultés de Flammarion, en rappelant un drame qui le frappe directement : le décès de son épouse bien aimée Sylvie, frappée de plein fouet par la grippe espagnole. Camille doit surmonter cette épreuve, qui le plonge dans la mélancolie, sans pour autant lâcher les débats autour de la Relativité générale, il comprend que cette conception révolutionnaire de l’univers s’apprête à bouleverser l’état de la physique jusqu’alors « newtonienne ».
En 1922 c’est la consécration d’Albert Einstein par la SAF, à l’invitation de Paul Langevin à Paris, mais Camille Flammarion n’est pas présent. Pourquoi ? Il est posé l’hypothèse s’appuyant sur la découverte de l’agenda personnel de Camille Flammarion, que le vénérable astronome souffre d’un lumbago depuis de nombreuses années, et pour soulager cette douleur insigne, il fait des villégiatures à Monte-Carlo, avec sa nouvelle épouse Gabrielle. Revenir en train pour écouter Albert Einstein, c’est environ 15 heures de train avec le tout nouveau « pullman express ». A l’âge de 80 ans, ce n’est pas chose facile et Camille ne souhaite probablement pas se montrer ainsi diminué.
La conclusion sera que Camille Flammarion a bien reçu la Relativité Générale, en a compris les enjeux et au moins les principes, Jonathan dévoile à l’assistance des calculs de la vitesse de la lumière effectué en 1874 par Camille Flammarion, démontrant qu’il n’est pas qu’un poète mais aussi un matheux quand il le faut. Flammarion est sans doute victime d’une légende dorée de « poète », mais il est avant tout un chercheur rigoureux et honnête, doté d’un bon outil mathématique, bien qu’il n’en fasse pas publicité. Ce que ne comprend pas Flammarion, c’est le fait qu’Einstein affirme que l’univers présente la forme d’une hypersphère, Camille est convaincu pour sa part que l’univers est infini, sans forme.Une conviction philosophique personnelle, qu’il met en second plan avec l’acceptation à la SAF de la Relativité générale. L’auditoire applaudit spontanément cet exposé dès la fin du dernier mot.
A 16h00 Alain Joets présente un livre peu connu de Camille Flammarion, publié dans la Bibliothèque des Merveilles en 1867, sous le pseudonyme Fulgence Marion : l’Optique. Il passe en revue l’optique connue à l’époque de Flammarion, déjà très avancée, mais présentant encore des lacunes notamment dans l’explication des affections de l’œil humain, comme la presbytie. Il nous présente des expériences d’optique, telles qu’effectuées dans le livre de Flammarion. Il expose le fonctionnement d’une lunette astronomique à lentille (réfracteur) et du télescope à miroir (réflecteur). Alain nous propose un véritable cours d’optique tel qu’il pouvait se faire au XIXe s, nous replongeant dans les connaissances des propriétés des différents verres en optique. Le verre qui pour Camille Flammarion était plus précieux que le diamant, puisque cet élément minéral ouvrait à l’humanité les mondes de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. La conférence est suivie d’un vif applaudissement.
A 17h00 M. le Maire Didier Romary, prononce la conclusion de ce symposium, ayant des mots sur l’avenir astronomique du village natal de Camille Flammarion, remercie les différents intervenants.
Le public et les conférenciers discutent ensuite ensemble, librement, pendant près d’une demi-heure, dans la bonne humeur. Avant de se retirer, contents et satisfaits, de cet intéressant symposium.
Jonathan Giné
Crédits images : Gilles Dawidowicz, Christiane Baradeau




