Le (presque) Midwest américain

Gilles Dawidowicz

Le 21 janvier 2017, Thomas Pesquet a posté cette vue présentée comme étant dans le Midwest américain, avec le commentaire suivant : « Un paysage de champs enneigés qui mérite sa place dans une galerie ! Un petit côté Nicolas de Staël peut-être ? »

L’image a été prise le 27 décembre dernier, à l’aide d’un Nikon D4 muni d’un téléobjectif à 340 mm ouvert à 6.3.

Nous sommes en fait quelque part dans le Nord-Est du Colorado aux Etats-Unis, à environ 150 km à l’est de Denver au milieu de nulle part. Du point de vue du paysage, c’est effectivement très proche de ce que l’on trouve dans le Midwest, cette grande “région” comprenant douze États, allant de la côte des Grands Lacs à la majeure partie de la Corn Belt et qui débouche sur les grandes plaines déprimées et monotones, par l’ouest. Le Midwest comprend l’Illinois, l’Indiana, l’Iowa, le Michigan, le Minnesota, le Missouri, l’Ohio, le Dakota du Nord, le Dakota du Sud, le Nebraska, le Kansas et le Wisconsin. Là, nous sommes au-dessus du Colorado, donc techniquement plus du tout dans le Midwest.

Située à l’est des Rocheuses et à l’ouest des Appalaches, toute la région du Midwest se trouve à mi-chemin entre les côtes littorales est et ouest. Autrefois recouverte par la grande prairie, c’est aujourd’hui le grenier à céréales des États-Unis comprenant des milliers de petites exploitations agricoles, mais aussi le cœur sociologique de l’Amérique rurale qui fait l’actualité récente.

Cette photographie un peu voilée de Thomas Pesquet nous révèle un paysage rural en hiver. Elle trahit une agriculture intensive et performante, très bien organisée, systématique, totalement mécanisée. Le découpage parcellaire saute aux yeux. Il est millimétré, précis, géométrique, au cordeau. Nord-Sud. L’alignement des parcelles est ici très spectaculaire. Les routes, invisibles sur le cliché, le sont également, car confondues avec les limites des parcelles. Le cadastre en damier est systématique et s’étend en fait comme cela sur des centaines voire des milliers de kilomètres carré à l’image de certaines grandes villes américaines dont le plan d’urbanisme moderne est également en damier. La nature est domptée, totalement sous contrôle et descend de l’agriculture familiale et traditionnelle des origines du pays.

Dans le Midwest, on produit principalement des céréales et on y fait de l’élevage, mais le tourisme s’y développe aussi. Le maïs est la culture principale car parfaitement adaptée au climat chaud et humide de l’été. Le blé, céréale polyvalente, est également cultivé même si, le soja, qui reste le meilleur complément à la culture du maïs, est le second produit le plus cultivé. En ce qui concerne l’élevage, c’est l’élevage porcin qui reste l’apanage des petites fermes familiales.

Cet étonnant paysage témoigne aussi d’une adaptation récente aux changements climatiques en cours, avec notamment une utilisation des cultures plus adaptée aux différents climats et types de sols mais aussi une irrigation mieux maîtrisée, tout en laissant certaines terres aux repos et en faisant des rotations des cultures régulières et programmées. Dans le Midwest, on s’adapte vite.

Le Midwest américain depuis l’ISS. Crédit : ESA/NASA

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