Compte rendu de la conférence de la SAF du 13 avril 2018

VIE INTELLIGENTE DANS L’UNIVERS
ET LE DÉFI DES VOYAGES INTERSTELLAIRES

Conférence donnée par Nicolas Prantzos

Astrophysicien IAP


L’équation de Drake (SETI)

Nicolas Prantzos. © J.P. Martin

Historique de la recherche de vie extérieure à notre planète
Cela a commencé par le fameux débat sur la pluralité des mondes, dont Épicure fut un précurseur. En 300 avant notre ère il annonce : « il est aussi absurde de concevoir un champ de blé avec une seule tige, qu’un monde unique dans ce vaste univers ».
Évidemment il n’est pas suivi par les « savants » de son époque. Platon et Aristote ne peuvent envisager cela, il ne peut exister qu’un seul monde habité. Plus tard, la nouvelle religion montante reprend bien sûr la même idée.
Mais, seul contre tous, Giordano Bruno prétend qu’il existe une multitude de mondes habités ; il refuse alors de renier ses paroles sur le bûcher le 1er janvier 1600 à Rome. Il faudra attendre Copernic, Galilée, Kepler et Newton pour faire évoluer lentement les esprits.
En effet, la nouvelle physique affirme que les lois physiques sont les mêmes partout, mais les lois biologiques ? On ne sait pas.
Jusqu’à présent la recherche de la vie dans le système solaire n’a rien donné, même si on se pose des questions sur :

  • Des anciennes formes de vie possibles sur Mars ?
  • Un océan interne sur Europe et Encelade qui pourrait abriter une forme primitive ?
  • Titan ?

Le début de la recherche d’intelligence extraterrestre
C’est à partir des années 1960 que l’on commence les recherches en radioastronomie. On se rend compte qu’en ciblant la raie de l’hydrogène neutre à 21cm (H est l’élément le plus abondant de l’Univers), celle-ci n’est pas absorbée par les gaz et poussières. Et on a tout de suite pensé que c’était le canal idéal pour communiquer avec d’éventuelles autres civilisations.
Et comme disait Carl Sagan : « si on ne cherche pas, c’est sûr que l’on ne trouve pas !»
Mais alors comment expliquer le silence cosmique jusqu’à présent ? C’est là que Frank Drake, un astronome Américain, fondateur du projet SETI (Search  for Extra Terrestrial Intelligence), a créé une célèbre équation, l’équation de Drake. Carl Sagan est devenu directeur du SETI puis à son décès la célèbre Jill Tarter (dont la vie a été romancée dans le film Contact de Robert Zemeckis avec Jodie Foster). Le SETI est maintenant financé de façon privée.
Le raisonnement était le suivant : notre galaxie contenant des centaines de milliards d’étoiles et probablement tout autant de planètes, combien peut-il y avoir de « candidats » pour abriter des civilisations technologiques ?

L’équation de Drake
On peut distinguer trois groupes de facteurs dans cette équation :

  • Les facteurs purement astronomiques : taux de formation…
  • Les facteurs liés à la biotechnologie : aboutissement à former la vie et même la vie intelligente…
  • Le facteur le plus délicat, celui lié à la durée de vie des civilisations.

On peut essayer de trouver quelques ordres de grandeur de N (nombre de civilisations) en faisant quelques suppositions concernant les différents facteurs.
La durée de vie d’une civilisation L, pour nous intéresser, doit être telle qu’elle soit par exemple deux fois supérieure au temps mis pour communiquer avec elle, ce qui parait raisonnable.
Une excellente remarque de Nicolas, « être seul dans l’espace ne signifie pas forcément d’être seul dans le temps ! » En effet des milliers de civilisations technologiques ont pu exister puis disparaitre sans avoir pu communiquer avec d’autres.
Pour établir des communications, il faut bien sûr tenir compte de la distance. En première approximation, on peut dire que notre Galaxie est équivalente à un disque de hauteur 2000 années-lumière (al) et de rayon 40 000 al. On peut partir du principe qu’elle pourrait être remplie de sphères de rayon r et se touchant d’une distance centre à centre de D=2r. Plus le nombre de civilisations serait grand, plus leur distance D serait faible. De façon évidente, la durée de vie des civilisations doit être plus grande que le temps mis pour communiquer entre elles ! Une valeur typique pour établir un contact serait que ces civilisations puissent vivre de l’ordre de 100 000 ans !

Le paradoxe de Fermi
Ce célèbre physicien italien qui travaillait à Chicago (pile atomique) puis à Los Alamos discutait avec des collègues (notamment Edward Teller) dans les années 1950 sur les ovnis (très d’actualité à cette époque de guerre froide).
Lorsque la discussion porta sur l’existence de civilisations extraterrestres, Enrico Fermi s’exclama « But where is everybody ? »  Mais où sont-ils donc ?
Ce fut le début de ce que l’on appela le paradoxe de Fermi (nom donné à cette problématique par Carl Sagan en 1975).
Le nombre d’étoiles dans notre galaxie est au moins de plusieurs milliards et celui des planètes bien supérieur ; les galaxies dans l’Univers sont tout aussi nombreuses, pourquoi ne sommes-nous pas contactés par les extraterrestres ?

Les voyages interstellaires
Les étoiles les plus proches sont quand même …loin ! Pour avoir une chance raisonnable d’atteindre les premières étoiles en une vie humaine, il faudrait pouvoir avancer à 10% de la vitesse de la lumière ! Ce n’est pas encore le cas ! Saturn V, la plus puissante fusée du monde, est bien loin du compte.
D’après N. Prantzos et basé sur une amélioration des performances de 1% par an, on peut espérer avoir un tel moyen de propulsion dans 2 ou 3 siècles.
Il existe des projets de voyages interstellaires comme :

  • Daedalus des années 1970
  • Starshot
  • Et probablement beaucoup d’autres.

Et N. Prantzos nous donne des zones de possibilités d’intervalles de temps permettant ou non d’entrer en communication.

Alors, où sont-ils donc ?
Plusieurs réponses possibles :

  • Ils sont déjà ici (voir X-Files : Mulder et Scully) et ils ont laissé des traces, il faut chercher.
  • Ils sont chez eux mais ne veulent pas venir ou ne veulent pas se manifester, ou ils nous mettent en quarantaine (cela peut se comprendre!!) ou ils ne peuvent pas technologiquement. Mais tous ces raisonnements ont un point faible : s’il y a beaucoup de civilisations comme la nôtre on ne peut pas imaginer que toutes ne désirent pas nous rencontrer ou qu’aucune si elles sont venues n’aient laissé de trace, alors, alors….
  • Ils ne sont nulle part et nous somme seuls ? Cela semble être la conclusion logique…

Cet article est basé sur le compte rendu détaillé de Jean-Pierre Martin, disponible  ICI

Livres à la bibliothèque de la SAF :

Prantzos N., Voyages dans le future, Le Pommier, 2009

Heidmann, J., Vidal-Madjar, A.,  Prantzos, N., Reeves, H., Sommes nous seuls dans l’Univers ?, Fayard, 2000